PRESSE – Realisme

d’Anthony Neilson
création “Les 7 soeurs”

1. Retransciption de la chronique consacrée au spectacle dans l’émission « Comme au théâtre » de Joëlle Gayot sur France Culture (12/01/09)
2. Article du Progrès
3. Article du Petit Bulletin
4. Lettre de Denis de Montgolfier ARTE/Lyon Capitale
5. Article paru sur www.lestroiscoups.com

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Retranscription de la chronique consacrée à « Réalisme »
lors de l’émission « Comme au théâtre » de Joëlle Gayot, sur France Culture, le 12 janvier 2009 :

« Je suis très enthousiaste car Catherine Hargreaves a créé Réalisme au théâtre de l’Elysée, dans le 7ème arrondissement.

Frédéric se réveille sans doute le lendemain d’une soirée bien arrosée, Frédéric mange des chips, regarde la télé, boit une bière, il refuse l’invitation de son meilleur ami, il lance une machine, se recouche, attend. Le personnage principal de la pièce Réalisme du britannique Anthony Neilson est un anti-héro, un adolescent inerte et débonnaire, à ce point privé de qualités qu’il emprunte son nom à l’acteur qui lui donne corps en l’occurrence, ici, Frédéric Beverina. Pas d’autres arguments que le déroulé de cette journée embrumée de la vie de Frédéric sinon que dans l’appartement où nous nous situons aucune frontière n’est dessinée entre réalité objective et égarement intérieur. Fred est traversé d’innombrables flux qui viennent tous d’un seul endroit, la télévision. Il est assailli par des génériques publicitaires, par des chorégraphies de comédie musicale, par les dernières actualités sur le conflit israëlo-palestinien ou encore par des débats talk-shows sur le tabac. Des flux d’informations qui crèvent l’écran, puis sont traités, digérés puis rendus par leur récepteur, en fantasmes, en rêves, en espoirs.

Anthony Neilson qui est également metteur en scène et scénariste travaille ses textes jusqu’à l’heure du moment de la représentation. Son théâtre est particulièrement poreux et réactif à l’actualité et il accorde une place essentielle à l’improvisation et aux propositions des comédiens. Catherine Hargreaves, comédienne formée à l’ENSATT épouse son parti en nourrissant la pièce de ses expériences et de celles de ses compagnons de route. Tous prennent un plaisir communicatif à brouiller les pistes entre le théâtre et la vie. La jeune metteur en scène a découvert Anthony Neilson il y a deux ans, tout à fait par hasard sur internet. Elle commande alors deux de ses pièces puis les traduit. Puis elle décide de faire un bout de chemin aux côtés de cet auteur peu connu en France qui écrit pourtant pour le Royal Court à Londres. Grâce à la curiosité, à l’ambition et au talent de Catherine Hargreaves, nous découvrons donc un nouveau représentant du théâtre « in your face » anglais qui connaîtra, on l’espère, le même succès que ses homologues Sarah Kane ou Martin Crimp. Réalisme est à voir jusqu’au 24 janvier au Théâtre de l’Elysée.
» Renan Benyamina

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Le progrès

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Le Petit Bulletin

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Lettre de Denis de Montgolfier, ARTE/Lyon Capitale

Bonjour Catherine,

J’ai aimé votre mise en scène hier soir.
Ces éclats de vie fractionnés dans un même lieu sont agréables à l’oeil et à nos oreilles.
Les 7 comédiens sont remplis de chairs, de cris et de générosités.
Cette journée d’un homme ressemble à la nôtre. Vous avez su faire jaillir un volcan de météorites constituées de masturbations, de dérisions, de relations parasites, d’amour, de détresses, de meurtre, et de lâcheté.
Mise en scène écartelée et compacte, occupation de l’espace délicieusement orchestrée, acteurs déployés et tristes, régie sonore agressive et délicate, régie lumière acidulée et tendre, décors pittoresque et chaleureux, costume recherchés et trash.
Bravo à vous et aux 7 jeunes acteurs.
Pas de reportage mais j’ai envie de vous suivre pour les prochaines mise-en scène.
Donnez-moi votre calendrier pour les prochains mois.

Bien artistiquement.

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Les trois coups :

Une gourmandise

Présente tout au long de cette saison au théâtre L’Élysée, la compagnie Les Sept Soeurs nous dévoile ces jours-ci une autre de ces nombreuses facettes avec « Réalisme », d’Antony Neilson, dans une drôle et talentueuse mise en scène signée Catherine Hagreaves. « Réalisme » ou comment rire avec le pire de soi, avec le quotidien vu de l’intérieur.

Réalisme est la tentative d’appréhender la banalité et le quotidien dans ce qu’ils ont de plus insoupçonné, c’est à dire leur caractère drôle jusqu’à en devenir jouissif. Le principe est simple : Réalisme ne nous conte rien d’autre que la journée d’un homme qui se réveille à l’issue d’une soirée visiblement arrosée et qui décide de ne rien faire. Voici en substance le sujet de cette pièce consacrée aux pérégrinations mentales de Frédéric Bévérina, dit « Fred », personnage principal, antihéros par excellence, que l’on suit et auquel on s’identifie le temps d’une pièce en forme de journée.

Si le réalisme ne se trouve pas à l’intérieur de la boîte crânienne de notre protagoniste, il se manifeste peut-être dans le décor qui n’est autre que l’intérieur d’un appartement ban(c)al, le mien, le vôtre, celui d’un jeune célibataire avec un lave-linge qui trône au centre, un canapé, table et chaises, bouilloire… objets du quotidien qui constituent autant d’éléments d’un tout. Ce réalisme est pourtant apparent, car viennent s’ajouter au mobilier de nombreux éclairages provenant du téléviseur, des diverses entrées et sorties qui s’allument ou clignotent, donnant parfois à la scène des airs du film Poltergeist.

Réalisme est bien évidemment une comédie, qui loin de se contenter d’être drôle, témoigne d’une pertinence rare. Les scènes d’humour s’enchaînent, elles sont composées de moments un peu potaches et de répliques de tous les jours, qu’on se surprend à dire ou à penser. Le réalisme bascule très vite dans le surréalisme lorsqu’on aborde la vie intérieure du personnage emplie de moments de vie fantasmés, rêvés. Touche-à-tout, cette mise en scène fait également la part belle à la musicalité sous forme de véritables zappings musicaux où se côtoient des classiques de la publicité, mais également sous forme d’un spectacle chorégraphié (rappelant les shows de Britney Spears ou de Madonna), durant lequel les comédiens deviennent de véritables sex-symbols.

Les sept interprètes présents sur scène jouent de leurs particularités et incarnent tour à tour avec justesse le bon pote un peu loser sorti des années 1980, bombers Waikiki, jean clair, baskets Pump, nuque de rigueur. La mère compréhensive, quant à elle, est l’incarnation parfaite de la morale. Il y a aussi les amis, l’homosexualité latente, les petites amies officielles ou officieuses. Ces divers portraits faits de clichés se succèdent dans un univers que l’on a déjà l’impression d’avoir vu et surtout vécu. Les glissements du réel à la fiction sont continus et on ne sait jamais trop si ces portraits existent ou bien s’ils sont sortis de l’esprit de Fred, en proie à un désordre intérieur.

Telle est la force de Réalisme : le quotidien, ce qu’il a de reconnaissable, ce à quoi on ne cesse de s’identifier, appréhendé au niveau le plus juste, le plus navrant aussi. En effet, Fred est un peu chacun de nous, partagé entre les liberté individuelles et les lois antitabac, peu certain de comprendre les tenants et aboutissants de l’actualité géopolitique… un peu beauf à certains moments, capable de passer une journée à manger des Choco pops en pyjama. Pourtant cette journée mentale que nous vivons à ses côtés semble plus agitée que n’importe quelle journée qui se voudrait exceptionnelle.

Ainsi, on peut dire de cette mise en scène de Réalisme qu’elle est semblable à une gourmandise dont on ne se lasse pas. On savoure ce spectacle pendant plus d’une heure trente, on se désole au moment des applaudissements et on se dit qu’on aimerait revoir cette pièce dès le lendemain pour rire une nouvelle fois du quotidien.

Élise Ternat

www.lestroiscoups.com